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Ijwi ry'impfuvyi n'abapfakazi

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Gasarara : Don de Ruhete

Par Gaspard Maheburwa

L’histoire a tourné des centaines de pages. Un miracle ? Non. Pas du tout. L’union de la population de Gasarara  regroupée au sein de la Coopérative « Bahabona » a  fait naître un projet de grande envergure sur le plan collinaire qui restera mémorable pendant des décennies.  Gasarara, l’ancien bastion de la guerre, fait travailler ses talents au service du développement communautaire. Une centrale électrique construite sur la rivière Ruhete produit 30 Kilowatts pour alimenter 120 ménages de la zone Nyabibondo en Commune Nyabiraba, province Bujumbura. 

Il est 11h10,  le centre Nyabiraba  est sous un ciel clair. L’Administrateur Communal de Nyabiraba, Ferdinand Simbananiye sort de son bureau.  Ce n’est pas pour aller gambader dans la rue. Non, il répond  plutôt au grand rendez-vous : celui d’accompagner une équipe des journalistes de la Radio TV Buntu-Ijwi ry’Impfuvyi n’Abapfakazi dans les hautes montagnes de Gasarara. Objectif : la coopérative Bahabona repérée par ces professionnels de l’information.

Devant la porte du bureau de l’Administrateur, la population qui est venue à la rencontre de cette autorité a un regard étonné qui fixe le visage de leur élu. Tout le monde peut deviner leur inquiétude. Cependant, l’Administrateur Communal les tranquillise : « Je reviens incessamment. Ne partez pas ».

Le véhicule nous attend. Nous voici dedans. Le chauffeur démarre.  Nous descendons jusqu’à la Route Nationale No 7.  Au lieu de continuer vers Buhonga, nous devions à droite. Nous nous dirigeons vers Kinyami. La route non macadamisée est vraiment praticable. De part et d’autre, des  maisons d’habitation ainsi que des arbres  offrent une vue splendide du paysage de Kinyami et autres collines éloignées. Nous continuons la route. Au niveau de Katugaramye, au lie de continuer vers le centre-Nyabibondo, nous devions à gauche vers Turangure dans une route datant de l’époque coloniale qui prend ses racines au niveau du Campus Kiriri. Nous voici à Mayemba, non loin de Kinuke. Au fond, nous voyons l’Ecofo Gasarara et la succursale catholique de cette localité. A une simple vue, nous serons là dans  20 minutes à pied. Pourtant, c’est une simple illusion. Nous laissons  le véhicule à l’Ecofo Mayemba pour faire le piquet dans une route tracée par la population. Dic dic dic dic. Nous voici au niveau de la rivière Gasarara après 50 minutes de marche. Le pont qui sépare Mayemba et Gasarara  fait peur.  Pas question d’aventure surtout quand vous regardez au fond de la rivière.  Les acrophobes choisissent de traverser la rivière à pied tout en gardant à cœur leur cible : la rivière  Ruhete à une dizaine de kilomètres du centre Nyabiraba.   

Au-dela de la Gasarara, les choses basculent dans un autre monde. Au lieu de descendre. Nous nous retrouvons devant une montagne. Nous n’abandonnons pas. Quelques minutes plus tard, nous voyons devant nous un groupe de gens, hommes, femmes et enfants assis tout près de la succursale catholique de Gasarara. Ceux-ci sont des membres de la coopérative « Bahabona ». En compagnie de l’Administrateur de Nyabiraba, du Chef de Zone Nyabibondo, des chefs collinaires ainsi que  de la population, une visite guidée commence.

Chute de la Ruhete

De loin,   à une hauteur d’au moins 600 mètres,  une chute impressionnante d’eau attire l’attention de tout le monde. Nous continuons vers le «  barrage ». Après,  les guides nous conduisent vers la maisonnette qui abrite la machine artificielle qui produit  de l’électricité. Entretemps, de la musique [kwasa kwasa (Pardon ! Kiramutuna parce que «  kwasa kwasa » n’est connue que par des personnes d’une certaine génération surannée)] se fait entendre partout. Un bruit bizarre se fait également entendre : po po po po po. C’est la préparation de la pâte de manioc (uburobe), repas spécial dans cette partie occidentale du Burundi. C’est une découverte dans un coin très fertile mais difficilement accessible. Etonnements, interrogations,…tout le monde (visiteurs) a en tout cas envie de savoir comment des personnes d’une localité aussi éloignée ont pu concevoir une marque de l’histoire.

L’Administrateur Communal de Nyabiraba  complimente  sa population.

A la microcentrale de Gasarara

« La microcentrale ! C’est un projet d’honneur  pour toute la commune de Nyabiraba. C’est une marque de l’histoire. C’est aussi une preuve que la population de Nyabiraba est déterminée pour innover », accentue Ferdinand Simbananiye , Administrateur Communal de Nyabiraba .

« Ce  projet né des natifs de la Zone Nyabibondo  a vu aussi la participation des techniciens natifs de Gasarara », martèle Ferdinand Simbananiye.

La microcentrale  est un soulagement pour la population de Gasarara qui a connu les atrocités de la guerre consécutive à l’assassinat du Président Melchior Ndadaye  en 1993.

« Gasarara a été sérieusement secouée par la guerre. La preuve est que non loin d’ici se trouve une fosse  commune  où sont enterrées 470 personnes sauvagement massacrées à la seule date du 14 novembre 1995 », regrette Ferdinand Simbananiye. Selon cette autorité communale, Nyabiraba abrite 1800 veuves encadrées  dans une coopérative créée à leur intention.

Le président de Bahabona se réjouit du projet

Les propos recueillis sur place convergent sur «  un projet communautaire qui pouvait soulager la population » plongée en désespoir par plus d’une décennie de guerre. Le président de Bahabona , Domitien Nzeyimana, souligne que des échanges pour aboutir à l’idée de la centrale ont pris plusieurs années.

Le président de la coopérative Bahabona, initiée en juin 2014, se félicite de ce projet tout en signalant qu’il a commencé avec des défis liés notamment aux convictions populaires. «  Nous étions à environs 130 membres au départ mais à la longue, certains ont dû quitter parce qu’ils ne pouvaient croire un seul instant qu’une centrale initiée par des natifs pouvait tenir. Ils croyaient en la force des étrangers pour pouvoir mettre en place un tel projet », précise Domitien Nzeyimana.

Pour le moment, la coopérative compte 66 ménages qui ont demandé l’adhésion volontaire. Les femmes ont aussi compris l’avantage d’être dans cette coopérative et elles ont été  les premières à convaincre leurs conjoints pour pouvoir adhérer. C’est pour cette raison  que, à en croire le président de Bahabona, des départements ont été mis en place pour renforcer le suivi du projet : le département des femmes, celui des hommes ainsi que celui de la jeunesse.

Trois collines profitent déjà de la présence de cette centrale électrique. Il s’agit de Gasarara, Mbare et  Mayemba,  la projection d’avenir étant d’associer d’autres collines

Les projections sont nombreuses grâce à cette opportunité d’électricité et l’Administrateur de Nyabiraba  ainsi que le président de Bahabona n’hésitent pas de parler même de la construction d’une usine de transformation agro-alimentaire si cette électricité est bien régulée en introduisant un transformateur électrique moderne

La coopérative demande un appui technique et financier pour pouvoir consolider le projet qui pourrait être profitable à une grande partie de la population jusqu’à l’échelle nationale.

Les bénéficiaires saluent l’initiative des natifs

La population de la localité se dit satisfaite de l’initiative qui, selon elle, est venue répondre à leurs préoccupations vitales. Les habitants de la localité de Gasarara témoignent qu’ils parcouraient au moins une dizaine de kilomètres pour ne fut-ce que recharger un téléphone mobile. Maintenant, tout se fait localement.

Selon Tharcisse  Gatambutsi., bénéficiaire et associé de Bahabona est une grande réalisation communautaire. « C’est une innovation dans notre circonscription. Les lycéens et les écoliers font des révisions dans la soirée sans problèmes grâce à cette électricité jusqu’à 23h00. C’est vraiment du jamais vu dans cette localité. Je dois vous dire que c’est un fait marquant, la réalisation des rêves qui dataient de longtemps. C’est pourquoi, en tant qu’associé, nous comptons étendre nos activités sur tout le territoire national. Mais avant tout ça, nous plaidons pour un encadrement par des personnes plus expérimentées que nous.  Nous voulons des stages de formation dans des entreprises spécialisées car nous accusons des lacunes jusqu’à présent relatives à l’expérience et à la compétence  » , a insisté Tharcisse  Gatambutsi.

Sinzobatungana Janvière, une sexagénaire originaire de Mayemba, bénéficiaire du projet d’électricité salue l’initiative à laquelle elle a été associée en qualité de membre fondateur. Elle parle d’une  innovation sans précédent dans sa zone natale. « C’est une bénédiction divine. Auparavant, je ne voyais l’éclairage électrique qu’au niveau de Kiriri. Maintenant, c’est notre tour. Plus d’éclairage à l’aide du mazout et du bois de chauffage, plus d’obscurité. Quand il s’agit de préparer de la nourriture pour mon chéri, je ne fais qu’appuyer sur le mur et  ,waouh,  toute la maison est éclairée », confie Sinzobatungana Janvière.

Nahokamye Mathias,  également bénéficiaire de ce projet abonde dans le même sens. «  Cette électricité a apporté un plus dans notre communauté. En plus de l’éclairage, je n’achète plus de batteries pour suivre les informations à la radio ».

Signalons que ce projet nécessite, pour être modernisé, la consolidation d’autres infrastructures comme les routes, notamment la route Campus Kiriri-Muyira-Kinuke-Mayemba-Turangure. Tous les intervenants auxquels nous avons tendu le micro plaident pour la réhabilitation de cette route afin de leur faciliter l’exécution des projets de développement communautaire, qui ne manquent pas dans cette région.

Gaspard Maheburwa

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